mardi 16 février 2010

Primera etapa: el destierro: ser desterrado, arrancado a su tierra
Segunda etapa: el exilio: estar sin raíces, fuera, pertenecer a ningún lado,
ni a lo que dejo detrás, ni al nuevo lugar que se encuentra.
El exilio ya queda incorporado para toda la vida.
« El dolor del exilio » Emilia de Zuleta



Première étape : le bannissement : être banni, arraché à sa terre
Seconde étape : l’exil : être sans racines, en-dehors, appartenir à nulle part,
ni à ce qu’il a laissé derrière lui, ni au nouveau lieu où il se trouve.
L’exil reste en soi pour toujours.






En entendant ces quelques mots, j’ai voulu comprendre, saisir pourquoi je pensais à ma mère, à ma grand-mère. Pourquoi j’avais l’impression qu’ils résumaient ce que je me représentais de leurs vies. Pourquoi j’ai toujours eu l’impression qu’elles n’avaient jamais été à leur place.
Le sort de l’exilé est celui d’être oublié.
Dès lors qu’il franchit la frontière de ce qui représentait sa patrie, son pays, jeté sur les routes, traversant les montagnes, les mers, il est rayé de la carte. Il n’existe plus. On peut alors l’identifier, selon différents cas de figure, par des termes comme l’exilé, le réfugié, l’immigré, le banni, l’expatrié, l’expulsé ; actuellement il recevrait le nom de « déplacé » selon le HCR, le Haut Commissariat aux Réfugiés des Nations Unies.
Pour pouvoir saisir ce que fut en particulier l’exil massif de ces quelques 470 000 exilés républicains espagnols, au lendemain de la victoire des nationalistes en 1939, il faut s’armer de toutes les approches que peuvent nous fournir les sciences humaines. Il n’existe pas un exil mais des exils. Chaque individu vit l’exil à sa manière avec sa propre histoire. De plus, l’exil est en perpétuel changement. Il évolue, se reconstruit. Son évocation déchaîne encore les passions de part et d’autre des frontières.

Ce travail de mémoire propose à travers un type de source particulier, le témoignage iconographique, un regard sur la vie dans les camps pour ces milliers de réfugiés et en particulier pour les auteurs des dessins et peintures retrouvés. Ce travail ne se présente pas comme une étude exhaustive sur la production artistique dans les camps, il offre simplement quelques pistes de lecture possible de l’action de création dans un camp. Ce mémoire se trouve à la frontière entre différentes disciplines des sciences humaines parce qu’il me semblait impossible d’envisager une telle étude sous l’unique regard artistique. Parce que l’exil est une réalité multiple, il ne peut être abordé cette étude sous un unique angle artistique, historique, sociologique ou psychologique sans en mutiler le sens.

La première difficulté rencontrée au cours de ce travail a été celle de déterminer la nature et le lieu de conservation des sources. De quel côté de la frontière les trouver? Ces artistes, qui pour la plupart ont connu les camps, étaient encore trop jeunes avant la guerre pour avoir été reconnus en Espagne. Ils sont donc partis en exil sans avoir marqué la scène artistique espagnole. En Espagne, très peu de documents attestent de leurs activités. Une fois la frontière passée, l’étiquette d’exilé ne les a plus quittés. Ils sont donc devenus des déracinés à vie : plus jamais ils ne pourront vraiment prendre racine quelque part. Ils n’existent ni pour le pays natal ni dans le pays d’accueil. Ces artistes, bien qu’ayant pour une grande partie continué leurs activités artistiques, sont constamment désignés comme artistes espagnols ou bien artistes de l’exil républicain. Ils n’existent pas en tant qu’« artistes » indépendamment de leur condition d’exilé. Cela peut aussi expliquer la raison pour laquelle leurs noms ne trouvent pas de place dans les dictionnaires d’artistes français. Mais alors, où trouver leurs créations ? L’année 1999 a été choisie comme date clef pour commémorer les soixante ans d’exil pour les réfugiés républicains espagnols. Cette année consacrée à la mémoire a été un prétexte pour organiser une série de colloques, d’expositions et de publications en Espagne, en France et en Amérique Latine. On peut citer par exemple les actes du congrès pluriel : Sesenta años después , rédigés en plusieurs langues : espagnol, catalan, euskera, galicien, français ou encore la publication de l’ouvrage : el exilio republicano español en Toulouse, 1939-1999, dirigé par Alicia Alted et Lucienne Domergue .
Toutes ces études ont permis de sortir de l’ombre quelques artistes espagnols et ont ainsi ouvert la voie à un travail de récupération de la mémoire relayé par une multiplication de publications, de création de musées en hommage à ces artistes. C’est le cas pour les deux artistes Josep Franch-Clapers et Apel•les Fenosa en Catalogne. Mais pour une grande partie des artistes ayant connu les camps, seuls leurs dessins ont été retrouvés et nous n’avons aucune information sur leur vie. Ces études peuvent représenter un point de départ dans la recherche des documents iconographiques. Les lieux de conservation de ces créations sont pour l’essentiel les lieux de production, à savoir les villages situés aux alentours des camps. Ces villages n’ont cessé d’entretenir la mémoire de ces lieux en édifiant des monuments, des musées, en souvenir aux personnes civiles et militaires qui y ont connu la mort.
D’autre part, comme nous le verrons au cours de ce travail, quelques artistes comme Josep Franch-Clapers et Josep Bartolí ont fait des donations de leurs productions dans les camps à la fin de leur vie, à leur pays natal, la Catalogne, afin de ne pas oublier d’où ils viennent. Leurs créations sont actuellement conservées dans des archives en Catalogne .

Cependant, il est essentiel de marquer une différence entre la création dans les camps de regroupement et ce que l’on appelle l’art de l’exil. Toutes les études réalisées autour de la culture de l’exil et de ses productions artistiques commencent à la sortie des camps de regroupement. Très peu de chercheurs se sont intéressés à la création dans les camps. De plus, ces études ont été faites pour une grande part, en histoire et non en histoire de l’art. Exceptée quelques études comme celles réalisées en 1989 pour la publication de l’ouvrage : Plages d’exil , dirigé par Jean-Claude Villegas ou bien celles de Lucienne Domergue rédigées en 2003, à l’issue du congrès international, la cultura del exilio republicano español de 1939 .
Il a donc fallu créer un cadre d’étude et trouver des références indispensables à l’élaboration d’un travail de recherche. Pour cette raison, il était nécessaire de s’orienter, quand cela était possible, vers les recherches effectuées sur l’art dans les camps de concentration nazis mais aussi avoir recours aux études réalisées dans d’autres disciplines comme en psychologie ou en sociologie.
Un autre élément est important à noter : la majorité des artistes présentés dans ce travail sont catalans. Cela s’explique par le choix volontaire de réduire le champ d’investigation à un groupe de personnes et parce que le lieu de recherche durant la première année fut Barcelone.

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